Gerry Cardinale (RedBird) : "Nous avons beaucoup appris avec le TFC"

Mon "euphorie" à propos du football européen est relativement récente. Pendant des années, je n'ai pas été intéressé. Mon business model, en parlant de sport, a toujours été de faire du business autour du sport, de créer des partenariats avec les différents ayants droit et de créer des business à valeur terminale autour de ces droits. Cela a commencé avec les Yankees, puis les Cowboys de Dallas, puis la NFL. Il y a cinq ou six ans, nous nous sommes demandés : « Pourquoi ne pensons-nous pas nous intégrer verticalement et devenir nous-mêmes des ayants droit ? ». Le faire aux États-Unis est difficile en raison des restrictions sur les fonds d'investissement institutionnels, alors qu'en Europe il n'y en a pas. En Europe, cependant, il existe un marché des transferts et la possibilité d'une relégation. Quand vous voyez qu'il y a un écosystème qui attire les États souverains et les oligarques, vous devez vous demander ce que vous faites. Je dois donner crédit à Billy Beane, c'est lui qui m'a "éduqué". Il est dans le football européen depuis 20 ans et il m'a dit que je ne voyais pas la situation correctement. J'ai dû aborder le football européen avec la mentalité "Moneyball", qui dit qu'il n'est pas nécessaire de sacrifier le niveau de performance sur le terrain pour gagner de l'argent ou vice-versa. Nous avons passé 5 ans à étudier et à apprendre. On pensait en savoir beaucoup sur le sport, mais une fois arrivés ici (en Europe, ndlr) on a eu le sentiment qu'il fallait vraiment faire une immersion totale. Nous avons rencontré environ 200 équipes dans tous les pays, réalisé notre premier investissement avec Toulouse, principalement porté par la data. C'était vraiment une belle expérience, le prix de départ était d'environ 60 millions d'euros, l'équipe a été reléguée et nous l'avons acheté pour 15 (en réalité pour 10 691 712 €, ndlr). La première année, on a vendu le premier joueur pour 15 millions et maintenant on est en Ligue 1, en milieu de tableau. C'était une bonne expérience, nous avons beaucoup appris. Aujourd'hui, nous sommes arrivés à l'AC Milan. Je pense que l'AC Milan est l'une des plus grandes marques du football européen. Berlusconi était le premier oligarque, il était le George Steinbrenner de son époque. Une des choses qui me surprend, c'est que Milan est le deuxième club à remporter la Ligue des champions après le Real Madrid, je ne le savais pas. C'est un atout pas assez exploité.

De nos jours, tout le monde utilise la data. Nous avons une société d'analyse de données appelée "Zelus". Nous recevons tous le même type de données, c'est la façon dont vous les utilisez qui compte. À Toulouse, nous avons des joueurs de 18 pays différents, et l'équipe a été construite uniquement sur la base d'analyses de données, sans scouting. C'était une expérience, et au bout d'un an on a été promu en Ligue 1. On est maintenant en milieu de tableau, on joue à un niveau qui est deux fois et demi ce qu'on a investi sur le marché des transferts. Je pense que les données jouent un très grand rôle, mais en particulier dans les grandes équipes, il y a un besoin d'un "modèle hybride" entre les humains et les données.